Photo : Liévin Chemin
“ah ça vous vous intéressez au quartier, au multiculturel? Et bien moi je vais vous dire monsieur Liévin, le racisme, je l’ai vu naître. C’était en 1973, avec le choc pétrolier. J’avais 16 ans je crois” — Abdel, 62 ans
Abdel est l’encadrant des apprentis qui rénovent ma maison; Il récite son histoire populaire du quartier, et me guide dans l’enfance et l’origine sociale de mon père. Puis survient une époque dont Bruxelles pourrait rougir, un épisode long de plus de 15 ans de vulgarité politique. Si “l’époque Nols” encapsule les années de son long mayorat et limitent à un homme l’immoralité du discours sur les étrangers, la mémoire Abdel nous montre le temps continu où les marocains de Belgique ont vécu la discrimination, de façon bien plus salissante et imprégnante qu’on ne pense le savoir aujourd’hui.
“je m’en souviens. Ma mère ne voulait pas que je joue avec mes copines marocaines. “Ils ont des poux, ces gens-là, qu’elle disait. Je ne comprenais pas” — Dominique, 58 ans
C’est en ce temps que je suis né, et heureusement les luttes antiracistes ont moralisé cette politique assumée d’un racisme ciblé qui perdure jusqu’aujourd’hui. Le doc se veut un chantier mémoriel qu’il nous reste à entamer pour réussir “le vivre ensemble”, cette quête bruxelloise sans fin, dans notre Babel brabançonne qui rayonne désormais de son hyper-diversité.
Aujourd'hui dans Gymnastique Sonore : Moi, raciste ?, un documentaire de Liévin Chemin.