Cette 2e gymnastique sonore programmée par l’association COMPTOIR DU DOC nous emmène dans l’un des derniers bars à strip-tease bruxellois, à travers le témoignage de femmes qui y travaillent et d’hommes qui y passent.
Canal Strip, de Sarah MOON HOWE (Belgique, 43’13 min – 2013)
Pendant dix ans, Sarah Moon Howe a été strip-teaseuse, un métier qu’elle exerçait la nuit en marge de son « vrai » travail, celui d’éducatrice en psychiatrie.
Pendant dix ans, elle a dansé et exhibé son corps sur scène, dévêtue sans pour autant se mettre à nu, se créant des personnages comme autant d’alter ego pour nourrir les fantasmes d’inconnus mais aussi découvrir sa propre féminité.
De cette expérience, elle a tiré le court-métrage documentaire Ne dites pas à ma mère (2003) sélectionné à la Mostra de Venise, à Visions du Réel à Nyon, et dans de nombreux autres festivals. Cette sélection et cette reconnaissance offrent à Sarah Moon Howe une légitimité qui la fait passer de simple strip-teaseuse à artiste à part entière.
« Canal Strip », documentaire sonore réalisé 10 ans plus tard, en 2013, propose à l’auditeur de découvrir le monde interlope, glauque et joyeux d’un des derniers bar à strip-tease bruxellois. Un endroit où les filles dansent de midi à minuit au milieu des ouvriers et des hommes d’affaires. Un endroit où l’on parle politique et affaires sociales en buvant une bière et en glissant un billet dans la culotte de la danseuse.
A travers des interviews de filles qui y travaillent ou qui y ont travaillé, de clients ou de petits amis, on découvre des lignes de vie, singulières, qui cheminent en parallèle et parfois se rencontrent pour nous donner de vrais instants de réflexion sur la condition d’être au monde.
Sarah Moon Howe :
« A 22 ans, je suis devenue strip-teaseuse. Pas pour l'argent ou pour séduire les hommes mais pour trouver la femme en moi, pour sortir d'une certaine invisibilité. Ce métier a été comme un rite d'initiation, une descente dans les abîmes du monde et une recherche pour comprendre les liens complexes qui lient et délient les rapports entre les hommes et les femmes. »
« Canal Strip est né de mon désir de me reconnecter avec mon ancienne vie de strip-teaseuse. Quelques années après avoir arrêté le strip-tease, ce sont surtout des conversations qui me restaient en mémoire. Des voix, des accents, des rires. J’ai donc décidé d’y retourner et de n’y emmener qu’un micro. »